lundi 27 avril 2009

Désossement

M’aime-t-il ? Va-t-il m’aimer ? Suis-je aimable ?
L’enfant, dans sa grâce d’être, goûte chaque instant comme une éternité. Il « est » car il n’a aucun doute d’être aimable ou aimé. Ne se pose pas pour lui la question de « Qui suis-je ? » : il est.
Nous perdons peu à peu la confiance au fur et à mesure de la découverte de notre individualité. Vient la comparaison, la mise en condition de l’amour reçu.
Selon les « coups durs » de la vie, cette perte est plus ou moins importante. Nous construisons des châteaux de cartes » et avons construit de bric et de broc, des illusions qui sécurisent et puis qui tombent si l’on prend la voie du guerrier qui s’abandonne au flux de la vie. Ni bonnes, ni mauvaises, les expériences lui adviennent, le guerrier les palpe, les embrassent et de cette double direction, abandon et accueil, les châteaux s’écroulent et fracassent le sentiment de faux équilibre.
Petit enfant, ouvert de corps et de cœur. Sujet-objet de jouissance. En lui naissent et puis disparaissent la peur, la joie, la tristesse et la colère. Sans traces. Nulle question en lui de « Qui suis-je ? ». Nul doute de « Suis-je aimable ? ». Confiance absolue en l’amour. La vie le traverses et le baigne dans son bain amoureux. Il est l’être sans ego.
Ces parents desquels il se sent joint, sont tels des Dieux pour lui. Et puis vient un jour où naît la blessure : les Dieux mettent conditions à leur amour. En fait, ils l’avaient déjà fait mais l’enfant ne l’avait pas perçu. Lorsqu’il le voit vient la blessure. Naissance de la faille, qu’il colmatera psychiquement : naissance de la première façade de protection de son être. Ainsi grandira-t-il de façade en façade et ainsi deviendra-t-il homme, névrosé, perclus de couche et de couche de colmatage, de refuges divers pour maintenir l’édifice fragile et illusoire de sa psyché. Son corps lui aussi temporisera les blessures. L’un ne va pas sans l’autre. Nulle séparation.
Le chamanisme, le yoga, je peux les reconnaître comme techniques chirurgicales afin de faire le chemin inverse de « décolmatage » de l’être. Chacune des couches inscrites subira une désintégration avec comme conséquence, sentiment de déséquilibre et deuil jusqu’à ce qu’un nouvel équilibre soit atteint. Qui sera à son tour démantelé, désossé. Le réel sera de plus en plus perceptible. L’être de plus en plus perceptible. Peu à peu, l’ego cède la place au vrai maître.

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