samedi 25 décembre 2010

Noël 2010


Une petite fille me regarde. Elle a quatre ans. « Et avant c’était trois » m’avait-t-elle dit lors de notre rencontre. C’est le réveillon de Noël. Foireux. Impression d’un guet-apens entre l’insupportable et l’inéluctable. A table, je mange à peine, toutes mes forces concentrées sur le chaos des sentiments qui tournoie dans mon cœur. Dans ce tumulte, je sens un regard sur moi. La petite me fixe de ses yeux ronds et rieurs.
Une heure plus tôt, seule dans le salon à digérer ma peine, elle avait bondit dans mes bras. « C’est mon frère qui m’a dit de le faire. » Conspiration de tendresse…Puis, elle était repartie pour revenir une minute plus tard. Même scénario. Elle se jette dans mes bras et en supplément, un bisou. La troisième fois, en plus du bisou, je reçus un « je t’aime » glissé à l’oreille.
Comme une vague paisible qui caresse et puis s’en va, la petite offrait sans arrière-pensée son unique trésor : un amour pur et innocent.
A table, long, long regard. A cet instant, je ne suis plus qu’avec elle. Elle me sourit d’une façon étrange presque impossible sur un visage d’enfant. Elle n’a plus d’âge. De nous tous, elle est l’aînée, l’ancêtre. Son sourire dit « Ne t’en fais pas, je suis là. C’est rigolo la vie, non ? »
Ce soir du réveillon de Noël 2010, j’ai rencontré un ange qui s’appelle Eleonora.

mardi 14 décembre 2010

Rencontre insolite d'un dimanche matin

Aujourd’hui j’ai fait une rencontre insolite en la vue d’un homme disons peu gâté par la nature. C’est une entourloupette pour être politiquement correcte, pour ne pas dire que du premier coup d’œil et de mon point de vue, je trouvais cet homme doté d'une laideur étonnante.
Nous sommes dimanche matin, il monte dans ma rue, un sac de course à la main. A moitié chauve, le visage grimaçant, petit, le corps malingre. A chaque pas, il claudique. Il porte une veste, sans style, noire un peu trop grande et un pantalon noir lui aussi, bien repassé dans les plis et un peu trop court, genre "eau dans les caves".
Il passe juste au moment où je sors de chez moi. Il tressaille, détourne le visage. Je lui emboîte le pas, fascinée, pour rejoindre ma voiture direction le boulot. Sa tête s’enfonce dans le col de son manteau. Il semble me craindre, comme s’il souffrait de mon regard posé sur lui. En ce dimanche, juste à l’ouverture du petit GB tout proche, peut-être a-t-il espéré ne croiser personne et surtout pas une femme dont il redoute le jugement ? Dans la rue déserte, je ne vois que lui.
Sa vue percute en moi des images de bête noire, de vieux chien qu’on maltraite, de "freak". A cet instant, simultanément, comme dans un film, au ralenti, ses doigts maigres se crispent sur son sac de course de plastique. Toujours au ralenti, je sens mon cœur s’ouvrir et je regrette immédiatement mon regard trop curieux. Bien sûr, peut-être cet homme est-il doté d'une beauté infinie à l’intérieur. Mais sa gêne exprime ce que je suppose être de la peur, comme s’il avait souhaité s’enfoncer sous terre et se soustraire à mon regard. Comme cela m’arrive aussi. En moi, des mots crient: "Je vous comprends, n'ayez crainte, comme vous je me sens parfois un "freak". On est pareil, je suis désolée pour ce jugement que j'ai porté sur vous."
Je ne dis rien, bien sûr, un mur de bienséance nous sépare...
Dans ma voiture, je suis émue, de compassion ou peut-être d'impuissance? Et je vibre de gratitude pour cette rencontre. En cette mâtinée qui avait débuté dans la mauvaise humeur d'une nouvelle nuit d’insomnie, cet homme m’avait, tel un réveil au cœur, rendue humble et sensible.

lundi 13 décembre 2010

Puzzle


Mon visage…une bouille de pomme, joues rondes, une fossette, le nez en trompette, des cheveux fins et doux. Yeux grands ouverts sur le monde, l’impression d’un grand puzzle à assembler : des pièces sombres, pas de doutes et aussi d’autres d’une immense clarté.
Sur ces pièces là, il y avait les arbres sur lesquels grimpés, les vergers perlés de rosée, si frais sous les pieds nus, les fleurs enivrantes de parfum, comme un miel, le ciel vaste qui réveille les ailes, l’odeur douçâtre de la terre engrossée de soleil. Avec mes sens en orbite, je jouissais. Je me sentais dedans et libre. Je m’appartenais pleinement.
J’appartenais aussi à un monde peuplé d’amis.
Bonjour Mademoiselle Coccinelle qui prend mon bras pour piste d’atterrissage.
Comment allez-vous ce matin, Dames Vaches si calmes et si sages ?
Comme ton pelage est doux et chaud Prince Cheval !
Puis-je te caresser et interrompre un instant ta solitaire promenade joli Chien si joyeux?
Ah, c’est bien juste ce que vous chantez là, Maîtres Oiseaux ! Mais continuez donc, je suis toute ouïe.
Et aussi les chats, les grenouilles, les papillons…
Tous avaient un langage et je le comprenais. Avec eux, c’était simple d’aimer. Avec eux, il n’y avait pas de gêne. On se disait simplement: je te vois, tu es vivant, vivante, belle, beau, je suis heureux, heureuse que tu existes. Mon petit cœur d’enfant se berçait de cette tendre et innocente mélodie.