mercredi 10 décembre 2008

Le saut

« Jusqu’ici tout va bien, jusqu’ici tout va bien… ». Saut dans le vide. Les verrous de sécurité ont lâché, voici venu le temps de la chute. Profonde incertitude. Personne pour dire : « Oui, alors la chute va durer dix secondes, trois minutes, cinq heures, vingt jours ou deux ans… ». Ni pour savoir où je vais atterrir ? Sous quelle forme ? Et si même il y a un sol ! Que dalle, nada, niente. Dépression. Etrange sentiment alors que tout, à l’extérieur, semble calme, sans danger qui menace. Tout est bien là, le monde , cahin-caha : les gens, les immeubles, les occupations, les mines grises, les rires rares, le froid… Normal. Mais, lancinante, revient la phrase : « Jusqu’ici tout va bien, jusqu’ici tout va bien… » Témoignage d’un doute, d’une menace invisible qui ne lâche pas. Dans cette journée où le soleil pointe son nez, je perçois, comme sous le voile, une dimension plus sombre où se tapit le sans forme : dissolution, perte, folie, mort. Mots redoutables et pourtant leur existence même repousse encore l’inéluctable … Le saut dans le vide. Tôt ou tard, sans aucun choix possible sinon de fuir la peur qui colle comme une ombre, se laisser tomber dans la nuit de l’âme où l’on ne sait plus rien.

mercredi 3 décembre 2008

Un incroyable voyage en Afrique depuis votre canapé avec « Ebène, aventures africaines » de Ryszard Kapuscinski.

Je referme le livre de Ryszard et l’envie me vient de chroniquer ce chroniqueur journaliste polonais, à la plume précise comme l'arête d'un diamant. Loin, très loin des idées reçues et rabâchées par les JTs, son regard, tour à tour stupéfait, horrifié, bouleversé ou ému, embrasse faits historiques, politiques et socials pour chacun des trente pays africains où il a traîné ses basques quelques quarante années. Au départ d’anecdotes personnelles, il réussit à capter des dimensions sur et sous humaines, qui font frémir. Car ce n’est pas depuis des hôtels de luxe qu’il écrit mais au cœur d’un tourbillon de vie et de mort, depuis les lieux pouilleux des villes ou des ruines ensablées d’un village, se frottant au plus près de l’horreur que vivent les africains depuis le choc frontal de l’apparition de l’homme blanc sur ce continent. Beauté et misère de ces peuples, paysages grandioses où règne encore l’animal sauvage, climat terrifiant et impitoyable, guerres fratricides et soif de pouvoir, mystère et mythologies, ... De la poésie à hauteur d’homme, c’est magnifique ! Allez-y, partez en voyage …